Tendance food le lait de dromadaire ?

Depuis quelques jours, je vois sur les réseaux sociaux circuler (à nouveau) des articles à propos du lait de dromadaire. Est-ce dégoûtant ? Pas plus que du lait de vache, de brebis ou… de chienne.

En novembre, nous découvrions cette vidéo de Peta sur la réaction des gens quand ils s’apercevaient qu’ils buvaient du lait de chienne. Un peu comme l’exemple de Mélanie Joy qui parle d’un dîner chez des amis où l’on trouve la viande très bonne… jusqu’à ce que l’on découvre qu’il s’agit de golden retriever. Une question de perception. C’est ce qui nous fait classer arbitrairement les animaux non humains en mangeables ou non.

Le lait de chamelle se consomme donc comme celui des vaches, des brebis, des chèvres… Du lait d’une autre espèce, reste du lait d’une autre espèce.

Une tendance « healthy »

Apparemment, la consommation de lait de dromadaire fait fureur en Californie. Il était déjà consommé par les populations africaines, mais il semble aujourd’hui sur le devant de la scène grâce / à cause de l’initiative d’un jeune entrepreneur saoudien qui séduit les hipsters outre-Atlantique.

Ce lait est réputé plus digeste que le lait de vache, plus riche en fer, contenant du calcium, etc. Notamment parce qu’il est non pasteurisé. Il soignerait même la maladie de Crohn ! Un tas d’arguments qui séduit surtout que l’on fait remarquer de plus en plus les dangers du lait de vache. Cependant la Food And Drug Administration des Etats-Unis pointe du doigt ces déclarations qu’elle juge infondées.

Que devient le bébé chameau ?

Cette tendance est très lucrative puisque la bouteille est vendu entre 12 et 13€ car il faut attendre 14 mois de grossesse avant de pouvoir traire la chamelle… Et si cette dernière produit 5 litres de lait par jour, c’est déjà bien. Une vache laitière « donne » (parce que c’est pas vraiment un don vous savez) en moyenne 28 litres par jour. La durée de lactation des chamelles est cependant plus longue que celle des vaches, elle peut durer de 8 à 18 mois.

Mais, que devient le fruit de la grossesse de la chamelle, le bébé chameau ? Aucun magazine tendance qui s’intéresse au sujet ne semble se poser la question. Si on lui prend son lait, que mange-t-il ?

Il y a fort à parier qu’il subisse le même sort que nos veaux. Le chameau est aussi exploité pour sa viande.

Il existe également un autre producteur de lait de chamelle qui avait fait parler de lui en Suisse. Il utilise les chamelles pour des promenades pour rentabiliser l’entreprise… Je me demande pourquoi on n’a pas encore pensé à faire cela avec les vaches puisque l’on sait les producteurs laitiers en pleine crise.

Reconversion

On pointe souvent du doigt les véganes, ces horribles défenseurs du bien-être animal au détriment de leur propre espèce (parce que beaucoup oublie que les êtres humains appartiennent au règne animal…), qui veulent voir les éleveurs au chômage. Je n’ai rien contre ces personnes, c’est le système que j’aimerais voir changer.

Bien sûr, une société sans exploitation animale, cela va faire fermer certains types d’entreprises. Mais cela permettra d’en développer d’autres. Ne voyons-nous pas tous les jours les limites de notre mode de fonctionnement ? Je ne comprends pas qu’on ne songe pas à remettre en question le monde dans lequel on vit, qu’on ne se dise pas que si une activité n’est pas rentable c’est qu’il faut en changer… Pourquoi s’obstiner jusqu’aux suicides ? J’ai lu le témoignage d’un éleveur de vache laitière devenu agriculteur végane. La reconversion n’est donc pas de la science-fiction.

Je ne prétends pas avoir la solution à tout et bien sûr qu’il faut mener des réflexions, sur de nombreux sujets, sur notre façon d’envisager le monde de demain. Mais se servir du chômage comme d’une excuse pour des pratiques injustifiables éthiquement… ça a ses limites. Certains utilisent le même argument pour renvoyer des êtres humains à leur misère, à la violence.

Il faut assumer ses choix : si le plaisir gustatif passe avant tout, autant le dire et ne plus s’enfoncer dans des arguments fallacieux. C’est une histoire avec votre conscience, pas contre les véganes. 

Nous n’avons plus besoin des animaux non humains pour survivre, ne pourrions-nous pas les laisser vivre ?
Gwen: Journaliste le jour, autrice la nuit (Vivre végane aux ed. Livre de Poche, Un Grand Noël vegan aux ed. La Plage). Végane depuis trois ans, militante antispéciste et abolitionniste. "Utilise ta tête pour vivre avec compassion", Yogi Tea Mantra

Voir les commentaires (2)

  • J'ai une question: pour les éleveurs dans les zones où le sol n'est pas cultivable (car pentu, sol lourd, caillouteux, climats non adapté, etc), quelles alternatives avez-vous? Dans ces zones les élevages avec des prairies permettent de produire des aliments et en même temps c'est bénéfique pour l'environnement et la biodiversité (contrairement aux cultures: aller comparer une journée la diversité d'insectes, plantes, animaux dans un champ de pois ou de blé avec un prairie, vous serez surprise).
    De plus, en Europe il y a quelques petits élevages de dromadaires/chameaux pour le lait, les animaux vivent jusqu'à leur mort naturelle (pour ça que le lait est cher) et les mâles sont gardés sur l'exploitation ou donnés dans des parcs animaliers car la viande de dromadaire n'est pas consommée ici. Vous écrivez un article sans vous êtes renseignées préalablement à propos de ce qui se fait en pratique, c'est bien dommage.

    • Bonjour, je ne suis effectivement pas une spécialiste des sols pour la culture. En revanche, des études montrent que le pâturage n'est pas une solution écologique intéressante, puisque l'on parle de biodiversité. Les ruminants élevés exclusivement en pâturages fournissent 3,7% des protéines animales, mais représentent 20 % des émissions provenant de l'élevage. Si les prairies pâturées, bien gérées, peuvent fixer le carbone atmosphérique, l'étude de 2017 de l'organisme Food Climate Research Network souligne que cela ne représente que 4% à 11% des émissions dues à l'élevage. La préservation des espaces naturels, notamment des forêts en partie détruites pour le pâturage, grand consommateur d'espace, pourrait contribuer au moins d'un quart à l'objectif de limiter le réchauffement de la planète à 1,5°C. (Source : Richard A. Houghton et al., Woods Hole Ressearch Center, 2017.) Il y a donc d'autres solutions à trouver pour une reconversion bénéfique pour les animaux et la planète.
      Concernant le lait de dromadaire, je ne connais pas effectivement ces élevages en Europe, je ne suis pas allée en visiter. Je suis toute à fait ouverte à la discussion. J'aimerais savoir comment sont élevés les bébés puisque j'imagine qu'ils n'ont pas accès au lait ? A moins que cette production se fasse en ne retirant uniquement que ce qu'il reste ensuite (à la manière des jaïns avec les vaches en Inde) ? Quoi qu'il en soit, je ne vois pas personnellement l'intérêt d'une telle consommation pour un plaisir gustatif quand beaucoup d'alternatives existent sans élever et nourrir (impact environnemental encore) des animaux pour cette production.

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